L'Eglise et la science.

 

 

I - Préambule.

On entend souvent accuser l'Eglise d'obscurantisme, elle se méfierait des découvertes de la science etc... Pour nous, Chrétiens, l'accusation est tout simplement ridicule, elle signifierait que dans le domaine de la Création, l'Eglise ne recherche pas la Vérité.

Une telle idée ne peut germer que dans le cerveau de ceux qui voient dans l'Eglise une association d'escrocs cherchant à soumettre le pauvre peuple à des superstitions sans fondement.

En fait si l'Eglise s'intéresse aux "découvertes de la science", elle accueille avec prudence les affrmations, parfois péremptoires, des scientifiques, qui ne sont que des hommes.

 

II - L'affaire Galilée, d'après Arthur Koestler ("Les somnambules"), Permanences n° 152, AFS n°98.

1514- Un chanoine polonais perdu dans les brumes de la Baltique, Nicolas Koppernigk, con-çoit des doutes sur le vieux système de Ptolémée. Selon ce système, la terre est au centrre de l'univers, les étoiles, le soleil et les planètes tournent autour d'elle. Il fait circuler parmi ses amis un court résumé de sa thèse qui place le soleil au centre du monde.

1532 - L'ex-secrétaire particulier du Pape Léon X (mort en 1521) donne au Vatican une leçon sur le système de Copernic qui est accueillie avec faveur.

1535 - Le cardinal Schoenberg engage Copernic à "communiquer ses découvertes au monde savant" par un ouvrage imprimé ce que celui-ci finit par faire.

1541 - Il déclenche l'ironie et les critiques de la part des Protestants. Luther parle de "ce nouvel astronome qui veut prouver que la terre tourne" et de "cet imbécile qui va contre l'écriture sainte".

1542 - Mort de Copernic.

1564 - Naissance de Galilée.

1589 - Lecteur à l'université dePise, puis à partir de 1592 professeur à l'université de Padoue, Galilée enseigne et soutient, au moins en public, le système de Ptolémée.

1590 - Découverte de la lunette d'approche par un opticien hollandais.

1606 - Galilée compose à l'intention de ses élèves et de ses amis, un traité dans lequel il mo-bilise tous les arguments traditionnels contre le mouvement de la terre : la rotation la ferait se désintégrer, les nuages resteraint en route..

1609 - Galilée se procure une lunette d'approche et en augmente le grossissement. Il en envoie un exemplaire au doge de Venise en lui laissant croire qu'il en est l'inventeur. Galilée réalise avec cette lunette de nombreuses observations qui lui font adhérer définitivement à la thèse copernicienne.

1611 -1613 Premières déclarations publiques en faveur du système de Copernic. L'Eglise ne s'y oppose pas :"Le concile de Trente a redéfini les doctrines et les pratiques de l'Eglise; pas un mot n'y fut dit contre le système héliocentrique. Galilée eut l'appui d'une pléïade de cardinaux parmi lesquels le futur Urbain VIII, ainsi que des meilleurs astronomes jésuites. Jusqu'à l'année fatidique 1616, la discussion du système de Copernic était non seulement permise, mais même encouragée, à la seule condition qu'elle s'en tint au langage scientifique, sans empiéter sur la théologie".A. K.

1612 - Premières attaques contre Galilée, elles viennent des universitaires laïcs.

1615 - Lettre du cardinal Dini à Galilée : "on peut écrire librement tant qu'on reste en dehors de la sacristie".

Lettre du cardinal (saint) Bellarmin à un partisan de Copernic :"Sil y avait une preuve réelle que le soleil est au centre de l'univers, que la terre est au troisième ciel et que le soleil ne tourne pas autour de la terre, mais la terre autour du soleil, alors nous de-vrions procéder avec une grande circonspection pour expliquer des passages de l'écriture qui paraissent enseigner le contraire, et admettre que nous ne les avons pas compris, plutôt que de déclarer fausse une opinion qui est démontrée vraie. Mais pour ma part, je ne croirais pas qu'il y ait de telles preuves avant qu'on me les ait démon-trées. Et ce n'est pas le même genre de preuve que prouver ""si le soleil est supposé être au centre et la terre au ciel, les phénomènes célestes sont ainsi sauvés"" et prouver que le soleil est réellement au centre et la terre au ciel." Mais Galilée ne voulait pas être obligé de fournir des preuves car le fond de l'affaire c'est qu'il n'avait pas de preuves, et qu'en plus il se trompe sur bien des points: le phénomène des marées qu'il attribue aux deux mouvements de rotation de la terre (Galilée refuse la notion d'attraction à distance) ou les vents alizés (dus en fait aux diffrérences de températures entre masses d'air).

Galilée dans la polémique devient grossier :"Comment puis-je faire cela (apporter la preuve) sans perdre tout simplement mon temps, quand ces péripatéticiens qu'il s'agit de convaincre se montrent incapables de suivre les raisonnements les plus simples"

1616 - Intervention du Saint Office. Les qualificateurs du Saint Office qualifient d'hérésie le système copernicien, mais le décret est plus modéré et ne parle pas d'hérésie. Galilée n'est pas nommé, mais tout le monde comprend qu'il est visé : mise à l'index du livre du Père Foscarini partisan du système de Copernic, et le livre de Copernic "De revolutionnibus" est suspendu jusqu'à ce qu'il soit corrigé (ce qui fut fait 4 ans plus tard, les 9 phrases dans lesquels le système héliocentrique était présentés comme certain ayant été supprimées).

Six jours après le décret, Galilée est reçu pendant trois quarts d'heure par le pape. Pendant 7 ans, Galilée ne publie rien, mais il ne tarde pas à reprendre ses polémiques au sujet, des taches du soleil, de l'apparition d'une comète ....

1623 - Parution de "Il saggiatore" (muni de l'imprimatur) sur les comètes.

Election du cardinal Barberini, ami et défenseur de Galilée, sous le nom de Urbain VIII.

1624 - Galilée est reçu par Urbain VIII et lui expose son projet d'écrire un livre, Dialogues, dans lequel il exposerait les deux théories. Le pape lui conseille de rester impartial.

1631 - Galilée bloqué à Florence, en quarantaine obtient l'Imprimatur pour son livre par des moyens malhonnêtes. Lorsque la supercherie est découverte, Urbain VIII en est très affecté.

1632 - Procès de Galilée. Le Pape essaie de lui éviter l'Inquisition et le fait traduire devant une simple commission, mais celle-ci après quelques auditions, le renvoie devant l'Inquisition.

Galilée se défend mal, il nie avoir pris position pour le système de Copernic. Le juge-ment rappelle les promesses non tenues, mais surtout le reproche le plus grave concerne la façon dont il a obtenu l'imprimatur pour "les Dialogues". Au cours de la dernière séance prononce les paroles d'abjuration devant ses juges (et non en public), il répète ce qu'il a déja dit les jours précédents, qu'il ne croyait pas à la rotation de la terre.

Il est condamné à "la prison" à vie (en fait une assignation à résidence) et à réciter une fois par semaine les 7 psaumes de la pénitence, ce dont il se déchargea sur sa fille, carmélite.

1642 - Mort de Galilée.

1992 - Discours de Jean-Paul II devant l'Académie Pontificale des Sciences :

"Comme la plupart de ses contemporains, Galilée ne fait pas de différence entre ce qu'est l'approche scientifique des phénomènes naturels et la réflexion sur la nature, d'ordre philosophique, qu'elle appelle généralement. C'est pourquoi il a refusé la suggestion qui lui était faite de présenter comme une hypothèse le système de Copernic, tant qu'il n'était pas confirmé par de preuves irréfutables. C'était pourtant là une exigence de la méthode expérimentale dont il fut le génial initiateur.

(....)

A partir du siècle des Lumières et jusqu'à nos jours, le cas Galilée a constitué une sorte de mythe, dans lequel l'image que l'on s'était forgée des évènements était passablement éloignée de la réalité.Dans cette perspective, le cas Galilée était le symbole du prétendu refus par l'Eglise du progrès scientifique, ou de l'obscurentisme "dogmatique" opposé à la libre recherche de la vérité. Ce mythe a joué un rôle culturel considérable : il a contribué à ancrer de nombreux scientifiques de bonne foi dans l'idée qu'il y avait incompatibilité entre, d'un coté, l'esprit de la science et son étique de recherche, et de l'autre, la foi chrétienne. Une tragique incompréhension réciproque a été interprétée comme le reflet d'une opposition constitutive entre science et foi. Les élucidations apportées par les récentes études historiques nous permettent d'affirmer que ce douloureux malentendu appartient désormais au passé. "

C'est à la suite de ce discours que la grande (et la moins grande) presse parlera de "réhabilitation".

Conclusion sur Galilée. (Arthur Koestler) :

 La gloire de cet homme de génie repose surtout sur des découvertes qu'il n'a jamais faites, et sur des exploits qu'il n'a jamais accomplis. Contrairement aux affirmations de nombreux manuels, même récents, d'histoire de science, Galilée n'a pas inventé le téléscope. Ni le microscope. Ni le thermomètre. Ni l'horloge à balancier. Il n'a pas découvert la loi de l'inertie; ni le parallèlogramme de forces ou de mouvements; ni les taches du soleil. Il n'a apporté aucune contribution à l'astronomie théorique; il n'a pas laissé tomber de poids du haut de la tour de Pise; et il n'a pas démontré la vérité du système de Copernic. Il n'a pas été torturé par l'Inquisition, il n'a point langui dans ses cachots, il n'a pas dit "eppur si muove", il n'a pas été un martyr de la science.

Ce qu'il fit fut de fonder la dynamique, et cela suffit à le mettre au rang des hommes qui façonnèrent notre destin. Il donna aux lois de Képler le complément indispensable pour l'univers de Newton."

(...) Je suis convaincu que le conflit de l'Eglise et de Galilée n'était pas inévitable; qu'il ne s'agissait pas d'une collision fatale de deux philosophies contraires , d'un choc qui devait se produire à un moment ou à un autre, mais plutôt d'un heurt de deux tempéraments, d'individus, aggravé par des coïncidences malheureuses. Autrement dit, je considère qu'il est naïf et faux de voir dans le procès de Galilée une sorte de tragédie grecque, un combat singulier entre la "foi aveugle" et "les lumières de la raison". ("Les somnambules" A. Koestler)

III - L'Eglise et l'évolution.

"Dans son encyclique Humani generis, Pie XII avait déja affirmé qu'il n'y avait pas d'opposition entre l'évolution et la doctrine de la foi sur l'homme et sur sa vocation , à condition de ne pas perdre de vue quelques points fermes. (...) L'encyclique considérait la doctrine de l'évolutionnisme comme une hypothèse sérieuse, à l'égal de l'hypothèse opposée. Pie XII ajoutait deux conditions d'or-dre méthodologique : qu'on adopte pas cette opinion comme s'il s'agissait d'une doctrine certaine et démontrée, et comme si on pouvait faire totalement abstraction de la révélation à propos des questions qu'elle soulève.

Il énonçait également la condition à laquelle cette opinion était compatible avec la foi chrétienne(...) "si le corps humain tient son origine de la matière vivante qui lui préexiste, l'âme spirituelle est immédiatement créée par Dieu"

En conséquence, les théories de l'évolution qui, en fonction des philosophies qui les inspirent, considèrent l'esprit comme émergeant de sforces de la ma-tière vivante ou comme un simple épiphénomène de cette matière sont incom-patibles avec la vérité de l'homme. Elles sont d'ailleurs incapables de fonder la dignité de la personne". Extraits d'un message de Jean-Paul II à l'Académie Pontifi-cale des Sciences 22-10-1996.

 

IV - Commentaires.

L'Eglise n'hésite pas à se confronter à la science et cette confrontation tourne parfois à la con-fusion de ses détracteurs scientifiques comme dans l'affaire du carbone 14 et du Linceul de Turin (et de Chambéry).

Distinguer hypothèses et vérité établie.

On pourrait penser que la science progresse en résolvant un par un les problèmes qui se po-sent à l'homme, et qu'ainsi un jour nous finirons par avoir répondu à toutes les questions. En fait, les choses ne se passent pas du tout de cette façon, non seulement la résolution d'un problème soulève la plupart du temps de nouvelles questions, mais des "vérités" scientifiques bien établies sont sans cesse remises en cause par de nouvelles théories. Exemple : 2+2=4 , remis en cause par la théorie de la relativité lorsqu'il s'agit d'additionner des vitesses.

 

Conclusion

Le concile Vatican I enseigne que la vérité atteinte par la voie de la reflexion philosophique et la Vérité de la Révélation ne se confondent pas, et que l'une ne rend pas l'autre superflue : "Il existe deux ordres de connaissance, distincts non seulement par leur principe, mais aussi par leur objet. Par leur principe, puisque dans l'un c'est par la raison naturelle et dans l'autre la foi divine que nous connaissons. Par leur objet parce que, outre les vérités que la raison natu-relle peut atteindre, nous sont proposés à croire les mystères cachés en Dieu, qui ne peuvent être connus s'ils ne sont divinement révélés". FR 9.

Les deux ordres de connaissance conduisent à la vérité dans sa plénitude. FR

 

"Ce qui est vrai, doit être vrai pour tous et pour toujours" FR 27.